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ANALYSES ET RÉFLEXIONS URBANISME - GENTRIFICATION - TRANSPORT
Publié le 16 juin 2010 | Maj le 23 avril 2020 | 1 complément

L’urbanisme sert à faire la guerre


De tous temps, « L’aménagement » de l’espace urbain a été une préoccupation majeure pour tous les pouvoirs. Le rôle de l’État étant d’assurer la prospérité et la durabilité du système marchand, il est aisément compréhensible qu’il ne peut pas se permettre de voir échapper à son contrôle les vastes entrepôts de marchandise humaine (et non-humaine) que sont les villes. Il est vital pour l’État de séparer les individus entre-eux, afin que le seul échange possible entre individus soit un échange marchand. De ce point de vue, la concentration humaine que constitue la ville est un danger potentiel, les chances d’y voir éclore des rapports non-marchands étant proportionnelles au nombre d’habitants la composant.

L’urbanisme est l’art de transformer n’importe quel espace de vie commune en vaste scène de spectacle dédiée à la marchandise. Il s’agit bien, en effet, d’une véritable mise en scène visant à enfermer chaque individu s’y trouvant physiquement dans le système marchand. Autrement dit, de réduire chacun en consommateur frénétique.

Certains, tels les « casseurs de pub » et autres décroissants, pensent que quelques aménagements substantiels tels que le retrait des panneaux publicitaires, mettra fin à la propagande marchande de l’espace urbain. Ce faisant, ils oublient que l’espace urbain est lui-même dédié au spectacle marchand.

L’illustration la plus éclatante de la nature réelle de l’urbanisme se niche dans la « réhabilitation » de quartiers anciens. La « réhabilitation » n’est qu’une destruction méthodique de toute possibilité d’échanges non-marchands.
Les habitants de la zone « réhabilitée » se trouvent dépossédés de l’espace public, celui-ci étant transformé en une scène aseptisée et sécurisée entièrement dévolue à des rapports marchands.

La modification est bien plus que du « vieux », remplacé par du « neuf ».

Concrètement, cette dépossession prend la forme d’une destruction des espaces de vies, remplacés par des espaces fermés, des espaces inventés pour exclure, pour séparer les hommes. A quoi servent ces statues géantes et ces immenses façades ? Elles sont pensées pour signifier à chaque personne la toute-puissance écrasante du système, en renvoyant à chacun l’image d’un être microscopique, impuissant face au gigantisme du monde qui l’entoure. A quoi servent ces éléments « design », accoudoirs et autres bas reliefs ? Ils sont pensés pour exclure, pour interdire à un petit groupe de se former, pour empêcher un sans-abri de se coucher et même pour surveiller le moindre promeneur. Ainsi, plusieurs bancs confortables se verront remplacés par un banc plus « design », forcément inconfortable et si l’on veut être assis sans douleur, il faudra désormais consentir à un rapport marchand en s’installant à la terrasse d’un café. Bien entendu, la zone « réhabilitée » aura été embellie (trottoirs refaits, arbres plantés) : il faut bien emballer la marchandisation d’un papier-cadeau attrayant (voire « bio »), afin d’attirer le consommateur potentiel qu’est devenu le passant. Cette destruction méthodique de toute possibilité d’échanges non-marchands s’accompagne forcément de tout un dispositif de contrôle et de surveillance de la population. Ainsi, les accès et la visibilité seront étudiés pour prendre en compte d’éventuelles interventions des forces de police et, le cas échéant, des caméras de vidéo-surveillance seront installées.

L’urbanisme affiche comme ambition de réunir les hommes. Effectivement, grâce à son intervention, les humains y sont réunis, mais comme rapportés dans l’espace des rapports marchands.

L’urbanisme fait la guerre aux relations qui s’affranchissent de l’emprise de la marchandise, il sert à faire la guerre contre l’être humain.

Comme le disait Le Corbusier, ce sera « l’architecture ou la révolution » [1].

Fabien Bon
- Solidaires, Ecologistes et Libertaires - Millau

Notes

[1Le Corbusier à dédié sa vie à fournir le capitalisme en ouvriers motivés. Il pensait que l’habitat était un paramètre essentiel de la motivation des ouvriers à travailler. D’ailleurs, il faisait une promotion active de l’exploitation que constitue le salariat : « travailler n’est pas une corvée, travailler c’est respirer ». Concernant l’habitat, cela ne devait surtout pas être un lieu de vie : « une maison est une machine à habiter ».


Proposé par Fabien B.
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1 complément

  • quesque c’est que cette annerie , pour le corbusier une habitation ne dois pas etre un lieu de vie :-)).... c’est dailleur pour ça que dans ces unités d’habitations il y a l’ecole la crèche un amphi des jardins collectifs et encore plus fort pour l’epoque un wc et une douche dans chaques appartements à une époque ou les wc et les douches etaient sur les palliers dans les couloirs des immeubles hormis pour les gens aisés , le tout à loyés modérés l’architecture du corbu est dailleurs donsidéré comme habitat sociale ça peut te parraitre pas grand chose aujourdhui , mais si pour toi le collectivisme c’est d’aller chier sur le pallier c’est claire que tu es bien partie pour débatre avec ma fille de 12 ans , quand à l’orenementation cela n’a rien à voir avec l’urbanisme c’est un autre domaine qui tend plus de la décoration que de l’urbanisme pour le banc design moin confortable que le banc heuuuu comment .... design aussi parce que le design n’est pas né dans les année 2000 quand au ville vitrine géante , pour le moment les grands centre commerciaux sont plus construits en périphérie des villes que dans les villes , et l’agencement des rues n’est pas encore fonction de l’emplacement des caméras , après il est claire que si tu penses que le boulangé du coin ou le bistrot sont les tenants du grand capitale la aussi tu pourras aisément debatre avec la soeur de ma fille qui à 6 ans .... sinon pour info le corbu etait membre du partit communiste

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