Actualité et mémoire des luttes à Saint-Étienne et ailleurs
ACTUALITÉS RÉPRESSION - PRISON
Publié le 22 février 2006 | Maj le 19 avril 2020 | 1 complément

[Nantes] A propos du blocage d’un chantier de construction d’une prison pour mineurs depuis le 20 février 2006


Un article précédemment publié sur ce site donnait des informations sur l’occupation du chantier d’une future prison pour mineurs à Nantes, dans le but de protester et d’empêcher concrètement la poursuite de ce chantier. Pour notre part, cette occupation nous enthousiasme ! Pour compléter, nous proposons de rajouter ici quelques infos de dernière minute, mais aussi des réflexions plus locales, concernant saint-étienne et sa région, ainsi que des liens et lieux pour trouver plus d’infos...

Rappelons que les personnes qui occupent les arbres du chantier de l’Etablissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) à Nantes comptent “s’opposer de manière déterminée aux violences de l’état et de l’économie, celles qui détruisent nos vies : l’incarcération, la misère, la ghettoïsation, les politiques sécuritaires et racistes, le salariat...”, et nous les soutenons fortement !

INFOS DE DERNIERE MINUTE QUANT À L’OCCUPATION

Face à la police, les personnes qui occupaient, au sol, le futur chantier, ont du s’en aller mardi, tandis que les personnes qui occupent les arbres sont restées. Une campagne d’information et d’explication de cette action continue dans toute la ville de nantes (diffusion massive de tracts, affichages, repas publics contre les prisons, réunion publique...) Pendant ce temps, les autorités font couper les arbres autour des arbres occupés. Ce matin (mercredi), à nantes toujours, des personnes ont occupé la grue d’un chantier mené par Bouygues (entreprise réalisant d’énormes profits en étant le plus gros constructeur de prisons et de centres de rétention en France.), en soutien aux occupants du chantier de l’EPM. 30 personnes ont été arrêtées et 5 qui étaient sur la grue sont en garde à vue. Il semblerait que pendant ce temps, l’occupation des arbres du chantier de l’EPM continue...

Sur le site d’indymedia nantes vous trouverez des textes d’analyse et de critique plus approfondis, ainsi que des infos de dernière minutes mises à jour régulièrement. Nous avons voulu relier ce type d’actions à la situation locale ou plus générale...

A PROPOS DES POLITIQUES SÉCURITAIRES ET CARCÉRALES...

Ce qui nous intéresse dans cette occupation de chantier, c’est qu’elle critique le fait que “l’éducation” se tourne de plus en plus vers une logique policière, elle critique aussi directement le fait que les comportements et relations humaines sont de plus en plus confiés à la justice, les incarcérations et les places de prisons augmentent. Les pratiques de contrôle et de surveillance s’étendent, avec tout ce que cela implique de violence morale et physique.
Cette occupation nous rappelle aussi qu’il faut repenser les rapports sociaux plutôt que de punir, nous pensons que c’est la logique même de la punition et de la veangeance sociale qu’il faut remettre en question. Pour approfondir cette question, nous ne pouvons que vous conseiller le livre de Catherine Baker : Pourquoi faudrait-il punir ? , qui est très bien argumenté. (publié en 2004 aux éditions Tahin Party, on en trouve aussi le texte intégral en cliquant ici)

LES PEINES ALTERNATIVES A LA PRISON ?

C’est un fait, probablement plus évident quand on est renseigné sur la réalité concrète : la prison détruit plus qu’elle n’aide ou ne “redresse”, malgré la sainte croyance en les bienfaits de la punition. La prison vous éloigne de vos proches, coupe, détruit ou détériore gravement vos liens sociaux, on y soumet vos faits et gestes au contrôle permanent et à la discipline, et souvent elle apprend ou perpétue des normes sociales par lesquelles il faut être fort et plus fort que l’autre pour ne pas se faire bouffer. La prison est une torture morale et physique.
Des peines de prison alternatives sont proposées pour améliorer les conditions des détenu-e-s ou amoindrir les dégâts. Ainsi on nous fait l’apologie du bracelet électronique ou des centres de semi-liberté comme un moindre mal, voire une faveur envers les prisonniers. Disons avant tout que tandis que ces peines alternatives se développent, de plus en plus comportements sont requalifiés en “délits”, et de plus en plus de “délits” deviennent nommés “crimes”. Ainsi un simple gribouillis sur un mur est devenu récemment un crime. En fait, les punitions se durcissent et se multplient. Des faits qui se réglaient auparavant hors des tribunaux peuvent aujourd’hui vous mener en prison.

D’ailleurs, Juillan, le directeur de la maison d’arrêt de la talaudière, l’a aussi précisé : un centre de semi-liberté, comme toutes peines alternatives à la prison, ne sert pas à désengorger les prisons mais à faire accomplir les peines non accomplies auparavant, les petites peines qui, à cause des “lourdeurs” de l’administration et du surpeuplement carcéral, n’étaient jamais effectués.
Les peines alternatives à la prison, tout comme la construction de nouvelles prisons, pour adultes ou pour mineurs, ne servent qu’à enfermer, virtuellement ou physiquement, toujours plus de monde.

LE CENTRE DE SEMI-LIBERTÉ A SAINT-ETIENNE

Il y a un an, quelques débats et polémiques ont émergé au sujet de la création d’un centre de semi-liberté dans le quartier de Montaud, à saint-étienne.
Si l’on suivait les débats et polémiques, on pouvait entendre des avis divers, plus ou moins virulents. Certains riverains du futur centre de semi-liberté ont fermement protesté : emportés par la passion sécuritaire, ils avaient peur que l’on accueille des délinquants à côté de chez eux. Les pouvoirs publics assuraient, ennuyés, que ces détenus ne leur feraient aucun mal, et qu’un centre de semi-liberté était nécessaire pour le bon fonctionnement du système pénal. Certains humanistes rajoutaient qu’il était important de développer ces peines de prison alternatives.

Finalement, le seul “vrai” débat portait sur le lieu d’implantation de ce centre de semi-liberté, tandis que son utilité, sa fonction, n’ont jamais été questionnées sérieusement.
D’ailleurs, les habitants de Montaud opposés au projet ont “gagné” et ce centre devrait être finalement construit à la talaudière. La preuve en est qu’il suffit d’un groupuscule de réactionnaires bien placés, qui constitue probablement un électorat important, pour faire plier les administrations d’Etat. Nous restons écoeurés, mais pas surpris, par ce déséquilibre flagrant : des tonnes de pétitions et de protestations, des milliers de mobilisations personnelles et collectives, menées par les détenu-e-s et leurs proches depuis des années à propos des injustices, des déces en prison, et des conditions de détention, n’ont, quant à elles, jamais abouti. La protestation contre l’établissement pénitentiaire pour mineurs à Orvaux, elle, n’est pas une protestation égoïste et sécuritaire de riverains, mais bien une mobilisation contre l’extension du système carcéral. [1]

Le placement en centre de semi-liberté est proposé aux détenu-e-s les plus “dociles”, en fin de peine, et aux peines les plus faibles : “vols simples, petites escroqueries, conduites en état d’ivresse, petits trafics de stupéfiants” [2]. Son objectif affiché est celui de la réinsertion des détenu-e-s : il permet entre autres, comme tous les aménagements de peine, de faire rentrer, par la contrainte et le chantage, certain-e-s détenu-e-s dans un système qui a fait d’eux des délinquants ou des déviants, tandis qu’il permet aussi de récompenser ceux qui ne veulent en aucun cas remettre en cause le système.

Pourquoi n’a-t-on jamais, au cour des “débats” à propos du Centre de Semi-liberté de montaud, entendu la parole des détenues, les premiers concernés ? Nous soutenons ceux et celles qui désirent un aménagement de peine, car nous souhaitons aider les prisonniers selon leurs volontés propres en ce qui concerne leurs conditions de vie.
Mais nous savons que les peines alternatives sont aussi des “pièges”, et que certains détenus les refusent avec véhémence. Ils et elles savent que ce genre de peines riment avec la logique de la carotte et du bâton, logique qui règne en prison : il faut être extrêmement docile vis-à-vis de l’administration, alors qu’elle vous fait la vie dure, il faut souvent passer de multiples étapes, quémander des gentillesses à l’administration, toujours donner plus, baisser la tête, pour qu’elle vous accorde des miettes. Exemple : certains détenus font des efforts de comportements et de discipline pendant des années, et si un jour ils sont agressés par un autre prisonnier, ils ont deux “choix” : se laisser tabasser ou se défendre. S’ils se défendent, même un minimum, ils risquent directement de voir tous leurs aménagements de peine réduits à néant. Voilà la logique pénitentiaire, dont fait complètement partie un centre de semi-liberté. Comme en prison, vos moindres faits et gestes y sont contrôlés, on vous apprend la soumission totale, ou vous apprend à être encore plus enchaîné au travail, et on vous apprend bien qu’au moindre écart (c’est-à-dire éventuellement dix minutes de retard au retour du boulot), vous risquez de retourner en maison d’arrêt. Ceci a été plusieurs fois clairement expliqué par les représentants de l’administration pénitentiaire dans les journaux locaux.

D’UNE PART, LA SOLIDARITÉ AVEC LES DÉTENUS...

Nous voulons ajouter que, face à ce système carcéral qui broie des milliers d’individus, la première action est la solidarité concrète. Il nous semble primordial d’écrire aux prisonniers, car la logique première de la prison est de les séparer du monde, et la correspondance avec l’extérieur peut, vraiment, permettre la survie des détenus : moralement, socialement et physiquement. D’autre part il nous semble aussi important de les aider face à l’administration : les aider de l’extérieur dans leurs diverses démarches, qui sont souvent un calvaire, que ce soit pour les aménagements de peine ou les dénonications d’injustices. Il est aussi souvent nécessaire de soutenir les proches de détenus : il est souvent très difficile de faire face seul à l’administration et à ses cruautés quand on est proche de prisonnier, et il est dur d’aider, seul, un prisonnier, et de garder pour soi ce que cela représente comme difficultés et démoralisations. Bien entendu il est aussi important de les soutenir financièrement, car la prison reproduit les inégalités en pire : il est encore pire d’y être sans argent. Que l’on soit contre les prisons en général, ou qu’on ait juste envie d’améliorer les conditions de détention, il suffirait déjà de s’associer à d’autres, de multiplier les petites initiatives et de le relier, pour remettre en cause ce qui détruit les prisonniers et leurs proches.

Vous trouverez ici une brochure intitulée “Infos et petites recettes pour les proches de détenu-e-s".

...D’AUTRE PART, LA PROTESTATION ET L’ACTION DIRECTE

Dans diverses villes, des collectifs se sont formés pour s’opposer à la construction et à l’existence des prisons. Il est aussi très intéressant de diffuser des informations sur ce qui se passe dans les prisons. Pourquoi ne pas faire tourner les infos quand on a l’occasion de savoir ce qu’il s’y passe ? Pourquoi ne pas aller chercher ces infos ? Ceci permettrait à d’autres de se rendre compte de ce qu’est réellement la prison, mais aussi aux détenus d’être moins seuls face à l’administration. Nous pouvons monter des collectifs, diffuser des infos, lancer et / ou alimenter des débats sur le système carcéral en tant que tel...

En plus, il nous semble nécessaire d’utiliser des formes d’actions directes dans nos luttes contre l’enfermement. L’occupation du site du futur chantier à nantes a pour objectif d’empêcher concrètement le démarrage des travaux, ou au moins de le retarder et de le rendre plus difficile et coûteux.

Ce ne sont que des suggestions, il reste beaucoup à faire...

N’hésitez pas à ajouter des infos, commentaires, expériences, dans le forum de cet article, ou en tant qu’articles sur ce site, ou sur les murs de la ville.

Vous trouverez des tas d’infos, lettres de détenus et leurs proches et analyse du système pénal, policier, judiciaire, carcéral... dans le journal L’Envolée :
2 euros chez L’Envolée, 63 rue de St-Mandé, 93100 Montreuil.
Tous les numéros sont consultables sur le site : http://lejournalenvolee.free.fr

Vous trouverez aussi beaucoup d’informations et opinions sur le site de Ban public (cliquer ici)

Notes

[1Précisons que cette protestation est menée par des personnes très variées, certaines sont contre la prison en général, d’autres seulement contre l’enfermement des mineurs, d’autres encore pour une autre politique répressive...

[2Juillan, directeur de la maison d’arrêt de la talaudière, La Gazette de Saint-Étienne, 25-31 mars 2005


Proposé par kaslebaro
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1 complément

  • voici juste un paragraphe repris du site d’indymédia nantes à propos de la fin de GAV pour les cinq personnes qui occupaient la grue :

    Bonne nouvelle, hier soir vers 19H30 les 5 personnes en garde à vues ont été relachées. Pour autant rien n’est joué et il faut s’attendre à d’éventuelles poursuites... En effet pour pouvoir etre relacheEs, les 5 personnes ont duE signer un papier leur signifiant que rien n’etait fait a leur encontre a la condition express que l’on entende plus parler d’elleux pendant 6 mois. Il leur a ete clairement signifie par les forces du desordres que si illes etaient repris dans les 3 ou 4 jours prochains, illes risquaient d etre poursuiviEs pour l’occupation. Il semblerait donc que Bouygues ne souhaite pas faire trop de bruit autour de cette occupation et ait trouve un terrain d’entente avec la police pour trouver un moyen de museler la contestation. Pouvoirs publics et prives marchant main dans la main, comme c’est surprenant...

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